samedi 13 février 2010

RENDEZ VOUS le 3 MARS.

PAUVRES contre RICHES ?

Jésus livre son message, son programme dans le discours des Béatitudes. Matthieu et Luc le relatent, mais Luc y ajoute : " malheureux vous les riches, malheureux vous les repus..." au chapitre 6. Ce texte central de l' Evangile a fait couler beaucoup d'encre. Certains y ont vu l'opium du peuple, la résignation. Restez malheureux, pauvres maintenant, vous aurez votre bonheur plus tard. D'autres se demandent s'il est possible d'être disciple du Nazaréen lorsque j'ai la chance d'avoir des biens, des richesses. Faut il se faire pauvre avec les pauvres pour être fidèle aux Béatitudes ?

Jésus a fréquenté des pauvres, des exclus comme des riches . Lui même était un artisan de Nazareth, pas un paria de sa société. Gandhi, l'hindouiste qui connaissait bien le christianisme, lisait les Béatitudes lors de ses meetings politiques pour l'indépendance de son pays. Il avait compris que le message ne portait pas sur : vous êtes heureux parce que vous pleurez, mais gardez l'espoir, vos pleurs vont cesser. Battez vous, luttez pour que le malheur ne soit pas le dernier mot sur notre terre. Jésus proclame que l'avenir n'est pas bouché, que le pire n'est pas le plus sûr, que la résignation est indigne de l'homme.

C'est le même message à propos des riches, des repus chez Luc. Nos richesses, et d'abord l'argent bien évidemment, mais aussi la culture, nos diplômes, notre carrière, notre rang social risquent de nous empêcher de voir les pauvres, les exclus à côté de nous, aux portes de nos maisons, de nos sociétés. Ces richesses risquent surtout de tuer notre désir, notre soif d'espérance. Etre repu, être plein, être outrageusement satisfait nous recroqueville sur nous mêmes, peut nous empêcher d'espérer autre chose que la jouissance de nos biens.

Jésus ne dit pas : malheur à vous les riches, les repus. le Nazaréen constate : vous êtes malheureux , vous les riches, les repus car vous risquez de ne plus rien attendre, de vous enfermer sur vous mêmes et vos biens. L'Evangile ne condamne pas une catégorie sociale, il chante la résurrection, le désir d'un avenir de justice, de paix , le refus de la résignation et du malheur.

mercredi 10 février 2010

SERAPHINE, MERCI.......

Merci, Séraphine de réagir à mes propos, de permettre la discussion avec d'autres inconnus à propos de la foi chrétienne, de la prière, de la justice. Si nos échanges peuvent nous aider à mieux vivre , c'est une excellente chose et les désaccords permettent de réfléchir et d'avancer.

La prière n'est pas d'abord, ni essentiellement une demande. Si prier, c'est appuyer sur un distributeur magique pour régler nos difficultés, je comprends que vous rejetiez cette prière. Prendre du temps pour dire à L'Eternel ce que je vis, mes peurs, mes angoisses, mes joies, mes plaisirs , c'est cela prier. Prier, ce n'est pas d'abord demander pour moi ou pour d'autres. Un enfant n'adresse-t-il la parole à ses parents que pour obtenir ce qu'il veut ?

Mais Dieu ne répond pas, écrivez vous. Vous avez raison, je n'ai pas avec Dieu la même relation que j'ai avec mes proches. Je ne Le vois pas, je ne Le sens pas. Il est Dieu et je suis un homme. MAIS Il nous a donné Jésus et ses actes et ses paroles sont le guide de ma vie. MAIS d'autres croient, prient, agissent, je ne suis pas isolé dans ma démarche. MAIS parfois, je pressens Sa trace dans une parole, un évènement, un renouveau.

Le tablier de service est préférable à l'attitude du priant, dites vous. Vous mettez le doigt sur une des grandes misères de notre église. Nous avons monté un mur entre les militants et les contemplatifs, comme s'il y avait deux sortes de croyants. François d'Assise, l'abbé Pierre, Desmond Tutu , soeur Emmanuelle ont été de grands acteurs des changements sociaux tout en étant des priants. Ils ne priaient pas pour demander une force exceptionnelle, ils ne confondaient pas prière et relaxation . Ils militaient et partageaient leurs vies avec Celui qui inspirait leur action . Ils L'aimaient, c'est pourquoi ils Lui parlaient dans la prière.

samedi 6 février 2010

AVANCE au LARGE.

Jésus invite Simon et ses compagnons pêcheurs du lac de Tibériade à reprendre leur bateau alors que la dernière pêche a été mauvaise. " Avance au large ". Luc 5,1-11. " Maître , nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre ; mais , sur ton ordre, je vais jeter les filets."

Notre église semble se trouver dans la même situation. La barque de saint Pierre n'attire pas les foules ! Certains préconisent de revenir aux " bonnes méthodes de jadis " lorsqu'il y avait du latin, de l'ordre, de la morale ....Et si le Rabbi de Nazareth nous disait à nouveau : " Avance au large ".


Dietrich Boenhoffer, pasteur allemand, était résistant au nazisme durant la dernière guerre. Il mourut en prison en 1945, quelques semaines avant la fin du conflit. Il écrivait en 1944 pour le baptême d'un petit enfant :

" Nous soupçonnons un souffle nouveau et bouleversant dans les paroles et les actions traditionnelles sans pouvoir encore le saisir et l'exprimer. C'est notre propre faute . Notre église qui n'a lutté, pendant ces années que pour se maintenir en vie, comme si elle était son propre but, est incapable d'être la Parole réconciliatrice et rédemptrice pour tous les hommes et le monde. C'est pourquoi les paroles anciennes doivent s'effacer, la vie chrétienne ne peut avoir aujourd'hui que deux aspects : la prière et l'action pour les hommes selon la justice. Quand tu seras adulte, le visage de l'église aura changé. Sa refonte n'est pas terminée.....Ce n'est pas à nous de prédire le jour, mais ce jour viendra, où des hommes, des femmes seront appelés de nouveau à prononcer la parole de Dieu de telle sorte que le monde en sera transformé et renouvelé. Jusqu'à ce jour, la vie des chrétiens sera silencieuse et cachée. Mais il y aura des hommes qui prieront, agiront selon la justice, et attendront le temps de Dieu. Puisses tu être de ceux là."

1945 . 2010. "Avance au large."

mercredi 3 février 2010

DIEU CREATEUR : PARLER ou se TAIRE ?

Hier soir, le café interreligieux avait choisi comme sujet de débat : Haïti : où est Dieu ? Le rabbin étant excusé, nous nous sommes retrouvés, le pasteur réformé, le président de la mosquée et le prêtre catholique. Nous avons essayé de dire des paroles de foi, d'espérance qui ne masquent pas la tragédie à Haïti tout en proclamant la bonté et la grandeur du Créateur. Ce n'est pas l'exercice le plus facile !

Plusieurs voix s'élèvent pour dire que ce genre de débat ne mène à rien, qu'il peut même être nocif. Un participant était en colère parce que nous avions parlé de Dieu et non de l'aide humanitaire. Selon lui, peu importent les convictions religieuses, seule l'urgence compte. D'autres ne viennent pas , pensant qu'il n'est pas possible de parler de la foi avec des Musulmans dans le contexte des tensions nationales et internationales. D'autres redoutent que ces discussions fassent le lit des intégristes. J'entends ces critiques, mais je ne les partage pas.

Hier soir, dans un climat d'écoute et de respect, nous avons partagé des paroles divergentes sur la foi au Dieu créateur. Pour certains il est nécessaire que Dieu soit à l'origine de tout ce qui survient pour que Sa Grandeur et Sa Puissance soient établies . Pour d'autres Dieu n'est pas la réponse au malheur, il n'en est pas la cause non plus. Il est Celui qui nous encourage à avancer, à vivre, à ne pas désespérer aux moments les plus difficiles. Dans ce café interreligieux, je crois que c'est la première fois que nous avons échangé sur la grandeur de Dieu avec une telle franchise. Comment ne pas se réjouir de cette liberté dans l'échange. Nous n'avons pas la même religion, raison de plus pour oser se parler. Sinon, quelle espérance nous habite si nous avons peur que l'autre ne puisse être un interlocuteur? Quelle image avons nous des autres croyants si nous n'imaginons pas qu'eux aussi aient envie de nous parler ? Et surtout ! ce clivage à propos du Créateur est il qu'entre l'Islam et le Christianisme ou aussi à l'intérieur des croyants chrétiens ?

Refuser que le dialogue ne puisse s'établir qu'à propos du plus petit dénominateur commun, c'est parier lucidement et fraternellement sur la richesse de la rencontre de l'autre, de l'Autre.